Thibaut Pinot se rapproche, David Gaudu se rassure

Le final sur les hauteurs de Mende, au terme de la célèbre côte de la Croix Neuve, a été le théâtre de deux courses en une ce samedi. À l’avant, Thibaut Pinot est allé chercher la troisième place au sein de l’échappée, après avoir longtemps bataillé pour s’y faire une place avec Stefan Küng et une vingtaine d’autres coureurs. Le Franc-Comtois a d’ores et déjà donné rendez-vous dans les Pyrénées, tout comme David Gaudu qui, parmi les favoris, n’a été devancé que par le maillot jaune et son dauphin. Le Breton rétrograde d’un rang au général en raison de l’échappée fleuve mais reste en embuscade. 

« Je n’aurais pas pu monter plus vite », Thibaut Pinot

Au départ de Saint-Etienne ce samedi, chacun s’attendait à une bataille des plus féroces pour une quatorzième étape promise à l’échappée. Chacun ne s’attendait peut-être pas, en revanche, à voir Tadej Pogacar attaquer dès la première bosse répertoriée de la journée, après dix kilomètres. Le peloton s’est ainsi morcelé dès le départ mais l’Équipe cycliste Groupama-FDJ a constamment été active pour se projeter à l’avant. Au terme d’environ quarante kilomètres de castagne ininterrompue sur un terrain vallonné, c’est finalement la côte de Châtaignier qui a permis le développement de l’échappée décisive. « C’était un départ extrêmement difficile, à bloc, commentait Philippe Mauduit. Au bout d’une bonne heure de course, Stefan et Thibaut sont sortis dans un groupe d’une petite vingtaine à un moment où tout le monde avait besoin de souffler ». Au sein de ce groupe, le grimpeur français et le rouleur suisse ont retrouvé quelques clients tels que Rigoberto Uran, Lennard Kämna, Daniel Felipe Martinez, Marc Soler, Jakob Fuglsang et de nombreux autres. « J’étais dans l’échappée la plus costaude du Tour, glissait Thibaut. À partir de là, je savais que ça allait être compliqué d’arriver au pied de la dernière ascension avec tout le monde ». Si l’échappée a véritablement pris le large, et pris plus de quatorze minutes d’avance à un certain point, Thibaut Pinot a vu ses pensées se vérifier à plus de cinquante kilomètres du but lorsque les attaques ont débuté. « Les autres équipes n’avaient aucun intérêt à m’emmener jusqu’au pied, c’était assez tactique, reprenait Thibaut. Ils ont laissé Stefan travailler et ne voulaient pas me ramener. Ça se comprend. C’est le jeu et il faut faire avec ». 

Un quatuor a ainsi pu se détacher avec Luis Leon Sanchez, Michael Matthews, Andreas Kron et Felix Grossschartner, et Stefan Küng a alors pris la poursuite en main pour amortir l’écart du mieux possible. « Ça a attaqué de très loin et Stefan a été obligé de se sacrifier de bonne heure pour pouvoir maintenir le contact et arriver au pied de la montée finale pas trop loin de la tête », expliquait Philippe. « Stefan a bien limité l’écart mais c’était tout de même compliqué, confessait Thibaut. Ils m’ont bien cramé dans cette portion de course. C’était dur à contrôler et les Bora-hansgrohe ont bien manœuvré ». Dans la côte de la Fage, à trente kilomètres du terme, le groupe de poursuite a perdu plusieurs éléments et s’est stabilisé à une trentaine de secondes des hommes de tête. L’écart était à peu près le même au terme d’une longue descente, au moment de débuter la difficile côte de la Croix-Neuve (3 km à 10%). Michael Matthews a déposé ses compagnons de fuite et Alberto Bettiol est allé le rejoindre, sans que Thibaut Pinot ne puisse prendre son sillage. « Je n’étais pas top au pied, disait l’intéressé. J’ai géré car j’avais les jambes déjà pleines de toxine. J’ai fait mon effort sur le sommet avec ce qu’il me restait et je n’aurais pas pu monter plus vite. Au pied, je n’aurais d’ailleurs pas pensé pouvoir faire ce que j’ai fait ». Dans le dernier kilomètre de montée, Thibaut Pinot a distancé le reste des fuyards mais n’a pu combler un trou de près de trente secondes sur Matthews, vainqueur, et Bettiol. Sur la ligne, il a de fait dû se contenter d’une troisième place forcément frustrante.

« Ça me donne envie et confiance », David Gaudu

« Je suis très déçu, mais c’était difficile de gérer aujourd’hui, confiait-il. Je n’ai pas grand-chose à regretter. Je n’avais pas de grandes jambes, alors j’ai fait avec mes moyens. Il m’en manque un peu mais c’est quand même positif. Je sais que je ne suis pas au top au regard de mes données de puissance mais je me bats. J’attends les Pyrénées, et je pense que ça ira encore mieux là-bas. Les échappées seront difficiles à prendre, sur le plat, mais on va retenter ». Près de douze minutes plus tard, son jeune acolyte David Gaudu a lui terminé en troisième position des favoris après une montée crescendo. « Je ne peux qu’être satisfait, disait le Breton. Parmi les favoris, il n’y a que les deux plus forts devant moi. C’était un terrain qui me correspondait et j’étais vraiment revanchard de l’Alpe d’Huez. Aujourd’hui, j’ai tout donné et j’ai lâché les chevaux. On voit ce que ça donne. Ça me donne envie et confiance. J’ai hâte d’être dans les Pyrénées. On va continuer dans cette lignée. On voit que derrière, même sans Stefan ou Thibaut en lieutenants, l’équipe est encore présente et effectue un travail de dingue toute la journée. On était encore trois dans le groupe des favoris au pied de la dernière côte. C’est juste énorme. Un grand merci à l’équipe ! » « À l’arrière, on a essayé de gérer pour passer la journée du mieux possible et rester au contact des meilleurs, concluait Philippe. David s’est un peu mis en mode gestion au pied de la bosse mais a rapidement compris qu’il fallait lâcher les chevaux. C’est ce qu’il a fait. Il n’y a pas d’écarts sur la ligne au final mais c’était important qu’il le fasse. Je pense qu’il s’est rassuré pour les étapes à venir ».