Nul besoin de s’appesantir sur la pelouse du stade vélodrome de Roubaix, la déception d’Arnaud Démare, visage poussiéreux, était perceptible. Elle était à la mesure du travail accompli depuis des mois en perspective de la course de ses rêves, à la mesure aussi des espoirs qui étaient les siens au départ de Compiègne, nourris par son excellent début de saison et ses podiums dans Milan-San Remo et Gand-Wevelgem. Le champion de France, distancé à 80 kilomètres de l’arrivée, a mis un point d’honneur à finir Paris-Roubaix. Marc Sarreau, formidable du début à l’arrivée, a été le meilleur Français.
À voir Arnaud Démare entouré de ses équipiers à quelques kilomètres du premier secteur pavé de Troisvilles, tout semblait aller bien. Le leader de l’équipe Groupama-FDJ est entré dans ce tronçon dans la roue de Marc Sarreau, parfaitement bien placé. Derrière lui, sur un pavé boueux, une chute massive a coupé le peloton en deux. Olivier Le Gac et Antoine Duchesne sont tombés et ont repris la route très attardés.
Les premiers secteurs ont défilé, tout se passait convenablement. Dans un peloton conséquent, à mi-course, Arnaud Démare s’est laissé glisser, victime d’un ennui technique. Il a immédiatement changé de roue et est reparti, dans le sillage du champion de Belgique Naesen (ag2r-La Mondiale). Première indication inquiétante, il n’a pu revenir dans le peloton au sein de ce groupe. Marc Sarreau s’est alors laissé distancer par le peloton afin de ramener son leader. Chose faite, Arnaud est de nouveau apparu en difficulté dans la trouée de Wallers-Arenberg, avant de remonter en compagnie de ses équipiers Marc Sarreau, Jacopo Guarnieri, Ignatas Konovalovas et Ramon Sinkeldam. Il a finalement lâché prise définitivement à 80 kilomètres de Roubaix.
« Je ne peux pas expliquer ce qu’il s’est passé mais j’avais mal partout… » Démare
« J’ai eu des pépins et j’ai compris que les jambes ne répondaient pas pour revenir, explique-t-il. D’entrée de jeu, j’ai eu des babioles, je me suis cogné le genou sur un des premiers secteurs pavés, puis j’ai cassé ma roue avant, j’ai roulé comme ça pendant 5 à 6 kilomètres, le temps de changer de roue. Je suis revenu, j’y ai laissé beaucoup d’énergie et je n’étais plus dans le match. Je n’ai pas réussi à me remettre dans la course. Ca roulait très vite… Je sais que je vais être bombardé de critiques mais bizarrement je ne pleure pas et je n’ai rien à regretter. J’avais tout bien préparé pour répondre présent. Cela fait deux mois que tout va bien, je suis venu avec de grandes ambitions. Je ne peux pas expliquer ce qu’il s’est passé mais j’avais mal partout… »
« Il ne faut jamais rien attendre de Paris-Roubaix, il faut la vivre ! » Démare
« Je suis déçu, forcément, poursuit Arnaud avec beaucoup de dignité. Je pense à l’équipe Groupama-FDJ, à mon patron Marc Madiot, à tout le monde, aux supporteurs, à ma famille aussi. Je suis vraiment désolé pour eux. On peut donc se pointer au départ de Paris-Roubaix en ayant fait des classiques exceptionnelles, prendre le départ en tant que troisième coureur mondial et puis ça se passe comme ça… C’est la démonstration qu’il ne faut jamais rien attendre de Paris-Roubaix, il faut la vivre ! »
Marc Sarreau a été le meilleur représentant de son équipe Groupama-FDJ.
En tête de course, gagnée par un magistral Peter Sagan (Bora-Hansgrohe) auteur d’une échappée de 55 kilomètres, Marc Sarreau a donc été le meilleur représentant de son équipe Groupama-FDJ, restant au contact des meilleurs pour aller chercher une belle, une très belle vingt-sixième place compte tenu des efforts prodigués depuis Compiègne auprès de son leader.
« J’ai travaillé en début de course pour Arnaud et puis sur la fin, c’était un peu sauve qui peut, dit Marc. J’avais de bonnes jambes mais dans la dernière heure, je paie sans doute mes efforts du début de course et peut-être aussi la fatigue du Circuit de la Sarthe que j’ai fini vendredi. »
Il faudra sans doute un peu de temps à Arnaud Démare et ses équipiers pour effacer la déception cruelle de ce dimanche mais au fil des semaines à venir, le rêve va reprendre forme. Dans un an, le champion de France et l’équipe Groupama-FDJ seront au départ de Compiègne pour gagner la mythique classique. Et un jour, forcément, il y aura une victoire.
Par Gilles Le Roc’h
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