Mickael Delage a le sourire. Après une saison compliquée pour l’équipe FDJ, il sent depuis le début de saison un état d’esprit différent et entame les premières grandes courses de la saison avec ambition. Le lanceur d’Arnaud Démare aimerait gagner rapidement dans Paris-Nice en avouant son rêve : être celui qui le lancera en fin de saison à Doha pour devenir champion du monde !
Mika, dans quel état d’esprit abordes-tu la saison ?
Un peu plus sereinement que l’an dernier. En 2015 j’ai été malade, souvent, blessé aussi. Cette année, je n’ai eu aucune problème pendant l’hiver et tout est plus facile. Au cours de la saison dernière, j’ai réussi à retrouver la forme mais on a connu des soucis dans les sprints et quand ça allait bien Arnaud et moi, quand on se trouvait, il y a eu des faits de course contraires. A force ça a mis un peu de tension, nous étions moins en confiance et tout marchait moins bien.
Cette année tu sens une approche différente ?
Tout le monde s’est remis en question dans l’équipe, les coureurs et le staff. Quand on remet tout à plat et qu’on se pose les bonnes questions, tout devient clair. Et tout redevient plus facile. Oui c’est reparti d’aplomb.
Tu as un rôle précis, le couple lanceur-sprinteur doit bien fonctionner. L’an dernier c’était différent ?
Oui et je l’ai perçu dès le Tour d’Oman. C’était différent. J’ai réussi à le lancer quelquefois même si ça ne s’est pas vu parce qu’on n’a pas gagné. Notamment à Paris-Nice quand Cimolai gagne à Rasteau. Je m’écarte à 175 mètres de la ligne mais Arnaud était un peu souffrant. Je n’ai pas eu trop de doutes sur mes capacités non plus… Après, il faut en tirer les leçons et savoir comment on en est arrivé là. On le sait et on espère gagner une étape de Paris-Nice. Ce serait bien de gagner là, il y a un bon niveau et ce serait révélateur. Cette année il y a moins de tensions dans l’équipe, plus de sérénité, plus de dialogues. Dans le groupe classiques aussi ça va mieux. C’est plus détendu. Je ne peux pas dire qu’on est plus dans le travail parce que l’an dernier on travaillait mais l’atmosphère est plus libérée.
Un lanceur n’est pas seulement celui qui roule vite et place. Il doit aussi être le confident, le complice ?
Dans le rôle que j’ai, je sais que je suis important pour Arnaud mais moi aussi je dépends des autres, de ceux qui travaillent devant moi. Si moi je suis trop seul ou mal placé, c’est pareil que pour Arnaud qui se retrouverait trop vite seul et mal placé. Arnaud doit avoir confiance dans le mec devant lui ou bien il choisira une autre option, une autre trajectoire, un placement différent. Tout passe par la confiance. Et s’il est facile de gagner vite de la confiance, on peut la perdre vite aussi, on l’a compris en 2015. C’est important de bien repartir comme on l’a fait cette saison.
Il y a l’apport de nouveaux coureurs comme Ignatas Konovalovas et Daniel Hoelgaard ?
On a perdu William Bonnet et je ne peux pas dire qu’il a été remplacé parce que personne n’est remplaçable. ‘’Kono’’ prend un peu le rôle que tenait William et heureusement qu’il a été recruté parce qu’il y aurait un manque dans les sprints.
Et dans sa façon de sprinter, Arnaud a besoin que tout soit clair ?
Arnaud a toujours conscience du danger, il pense aussi aux autres. Il ne veut pas provoquer une chute et en mettre 30 par terre. Il est plus dans l’optique ‘’je me décale, je fais mon sprint et si je suis fort je gagne’’ plutôt que de se faufiler et de faire courir des risques démesurés.
Pour bien lancer un sprint, faut-il être pote avec son sprinteur ?
Ça aide. Parce que c’est beaucoup de risques et parfois c’est le petit effort dans le vent que tu vas faire en plus qui va jouer. Quand tu apprécies la personne, tu vas au-delà que pour un autre. En course, je ne parle pas beaucoup. Dans les 30 derniers kilomètres, je suis concentré, je ne parle pas. Pas même à Arnaud. De toute façon, il a confiance, il suit et il n’a pas besoin de parler non plus.
Tu es membre de l’équipe FDJ depuis 2005. De quelle victoire rêves-tu ?
Ce serait bien, sans être prétentieux, d’être au championnat du monde au Qatar, de faire le job pour voir gagner Arnaud Démare. Ce n’est pas le gros objectif de la saison mais si je devais gagner une course en tant qu’équipier, ce serait celle-la.
C’est facile quand on devient pro d’accepter rapidement ce job ?
Tout dépend avec qui tu es et qui sont les leaders. Quand tu as de grands leaders, tu te résous à tenir ce rôle et tu comprends que tu n’es pas fait pour être leader. Moi, je suis devenu pro avec Philippe Gilbert, Brad McGee et Baden Cooke et très vite j’ai su qui sont les champions. Ils sont au-dessus de toi et tu te mets vite à travailler. Après, c’est un état d’esprit. Tu acceptes vite ou pas. J’ai eu la chance d’être avec Phil qui était très reconnaissant et qui aidait les équipiers à faire ce travail. Il savait dire merci et c’est gratifiant de bosser pour un leader comme lui.
Ça signifie qu’entre Philippe Gilbert et Arnaud Démare, tu t’es ennuyé ?
J’ai eu un trou oui mais heureusement il y avait Yauheni Hutarovich qui avait de bons résultats avec nous. Heureusement qu’il était là pendant deux ans, avant que Vichot et Pinot arrivent. Et puis Arnaud.
Lever les bras ne te manque pas ?
Si tu arrives à vivre la victoire avec ton leader, c’est comme si tu gagnes toi-même, tu sais que tu y es pour quelque chose. Certains ont du mal à être équipiers pour essayer de continuer à lever les bras mais moi ça ne me dérange pas du tout.
Tu t’es bien remis de ta chute à Kuurne-Bruxelles-Kuurne ?
Avant le Kluisberg, Daniel Hoelgaard provoque la chute, involontairement, peut être une petite erreur de jeunesse à frotter plus que nécessaitre. Il tombe devant moi à 70 km/h. J’ai eu mal à la hanche, au coccyx, et toujours un peu aujourd’hui. Quand j’étais par terre, j’ai ressenti une grosse douleur, le choc m’a bien sonné. J’ai cru être bien touché mais ça va…
Tu aimes ton travail dans les classiques ?
Je prends plus de plaisir dans les sprints parce que j’y suis meilleur. Si je dépose Arnaud à 175 mètres de la ligne d’arrivée, il y a 90% des chances de le voir gagner. Si je le place premier à l’entrée du Vieux Quarémont, il peut tout se passer. J’aime ces classiques mais le sprint c’est mieux. Quand je m’écarte et que je le vois gagner, c’est autre chose que dans une classique où c’est plus ingrat.
Quel est ton programme ?
Quasiment le même qu’Arnaud Démare, même si lui va courir un peu moins, en ne faisant pas les Trois Jours de La Panne mais comme lui je vais faire le Giro et pas le Tour. Ca me fait bizarre, mais c’est bien de le savoir tôt même si ça va à nouveau questionner les gens puisque je ne l’ai pas fait en 2015. Si tu fais le Giro à 100% en ayant ton pic de forme au mois de mai c’est compliqué de doubler. De toute façon, cette année dans le Tour ce sera tout pour Thibaut.
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