C’est un colosse qui se dressait face aux coureurs, ce jeudi, sur le Tour d’Italie. Le Passo dello Stelvio, col légendaire s’il en est, était censé conduire à des bouleversements au classement général. C’est bien ce qu’il s’est produit avec la prise de pouvoir de Wilco Kelderman, quand son coéquipier Jai Hindley remportait l’étape. Mais cet obstacle d’envergure était aussi le dernier vrai rempart pour les sprinteurs avant une dix-neuvième étape taillée pour eux. Bien entouré par ses coéquipiers, Arnaud Démare a bouclé cette étape vertigineuse dans le temps imparti, et pourrait prétendre à un nouveau succès vendredi.
Peut-être la plus belle de ce Giro 2020, la dix-huitième étape était également l’une des plus craintes de par l’ascension du Passo dello Stelvio, Cima Coppi (point culminant) de l’épreuve, avant l’arrivée au sommet des Lacs de Cancano. La difficulté du parcours était une chose, les potentielles complications météorologiques en étaient toutefois une autre. « Heureusement, on a abordé cette étape dans de bonnes conditions climatiques, racontait Sébastien Joly. On pouvait légitimement craindre le pire à cette époque de l’année. On aurait pu imaginer une journée dantesque avec de la pluie, du froid, voire de la neige. Le point positif, c’est qu’il faisait relativement beau. Il faisait tout de même 4°C degré au sommet du Stelvio, mais on partait malgré tout du bon pied de ce point de vue ». La course, elle, s’est immédiatement enflammée avec de nombreuses attaques dans le premier col, dès le kilomètre 0, pour former l’échappée du jour. Celle-ci ne s’est toutefois dessinée que quarante kilomètres plus tard, et il ne restait logiquement plus grand monde dans le peloton maillot rose.
« À circonstances exceptionnelles, mesures exceptionnelles », Sébastien Joly
« Au vu du gros rythme imposé d’entrée, les gars ont lâché prise dès la première bosse, détaillait Sébastien. À partir de là, il ne fallait pas s’affoler. On s’y était préparés. Après le premier col, ils ont d’ailleurs rattrapé un autre groupe. Ensuite, ils ont géré comme ils en ont l’habitude, souvent en prenant la main pour faire le rythme. Nous avions de nouveau donné carte blanche à Kilian aujourd’hui, mais comme il s’est retrouvé en queue de groupe après ses efforts de la veille, on lui a donc demandé de se relever pour qu’il puisse donner un coup de main au groupe autour d’Arnaud. Ce qu’il a très bien fait ». Dès lors, alors que la bataille entre les cadors du général s’initiait à l’avant, le gruppetto optait pour son plan d’attaque habituel : les ascensions en gestion, les descentes et les vallées à vive allure. Particularité du jour, néanmoins, le maillot cyclamen et son groupe ont fait une courte halte durant l’ascension du Stelvio. « On savait qu’il ferait froid au sommet, alors on s’était organisés, poursuivait Sébastien. À circonstances exceptionnelles, mesures exceptionnelles. On avait planifié de s’arrêter à trois kilomètres du sommet pour pouvoir s’habiller rapidement au sein du gruppetto. Les gars ont pu enfiler des jambières, des vestes, des imperméables, des caches-cou et cela leur a permis d’aborder la descente du Stelvio dans de bonnes conditions ».
Passé avec environ quarante minutes de retard au sommet par rapport au trio de tête, le gruppetto a finalement franchi la ligne 50 minutes après le vainqueur de l’étape Jai Hindley. « Les six ont rallié l’arrivée ensemble, concluait Sébastien. C’était une nouvelle journée de gestion, mais ça ne veut pas dire qu’ils la font en dedans, simplement qu’ils la gèrent à leur main, pour ne pas exploser. Peu importe la journée du lendemain, l’objectif reste à chaque fois le même, à savoir terminer dans les délais. C’est ce qu’ils ont bien fait aujourd’hui encore ». Arnaud Démare sera donc bel et bien au départ de la dix-neuvième étape vendredi, qui pourrait se conclure par un sprint. Néanmoins, avec environ 260 kilomètres à parcourir et après quasiment trois semaines de course, l’emballage massif est loin d’être assuré.
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