C’est une semaine de course que Laurence Pithie n’est pas près d’oublier. Après son premier top-10 au plus haut-niveau mercredi, puis son tout premier podium samedi, le Néo-Zélandais a conclu cette séquence de la plus belle des manières ce dimanche. À l’occasion de Cholet-Pays de la Loire, le jeune homme de 20 ans a confirmé sa montée en puissance en allant arracher, au bout de l’effort, et au terme d’une belle offensive en compagnie de Lewis Askey, un premier succès mémorable chez les professionnels. Il apporte par la même occasion sa deuxième victoire de la saison à l’Équipe cycliste Groupama-FDJ.
À peine auréolé de son premier podium « chez les grands », Laurence Pithie était déjà tourné vers la suite des événements samedi à la Haye Fouassière. « J’espère maintenant qu’on pourra faire une place de mieux demain sur Cholet-Pays de Loire », lançait-il peu après la cérémonie protocolaire. Comme tout au long de la semaine sur la Nokere Koerse, le Grand Prix de Denain et la Classic Loire Atlantique, c’est donc une équipe Groupama-FDJ très jeune, mais néanmoins ambitieuse et conquérante qui voulait ainsi terminer le travail à Cholet. « Je leur avais dit qu’il fallait absolument qu’on en mette une au fond ce week-end, rembobinait Thierry Bricaud. On avait la force collective pour le faire. Au briefing, on s’était dit qu’on allait tout faire pour gagner. Peu importe avec qui ». Le plan de bataille était limpide ce dimanche matin. « L’idée était qu’on fasse tout pour Paul si un sprint était possible dans le dernier tour, mais Lewis et Laurence avaient carte blanche pour accompagner les coups à 2-3 tours de l’arrivée, ajoutait Thierry. On savait que ça allait bouger et que les équipes de sprinteurs auraient du mal à contrôler ». L’échappée du jour a pu mener les débats jusqu’à l’entrée dans le circuit de Cholet, à une cinquantaine de kilomètres de l’arrivée. Mais dès la première boucle, le peloton s’est montré remuant, condamnant ainsi les hommes de tête de bonne heure. « La première partie de course n’a pas été très dure, mais quand c’est facile au début, c’est naturellement plus dur à la fin, expliquait Lewis Askey. C’était mieux pour nous. Le circuit avait un peu changé par rapport à l’année dernière. Les bosses étaient un peu moins difficiles, mais on devait quand même être vigilants. Dans le premier tour, je me suis isolé avec quinze coureurs mais tout s’est regroupé puis on a couvert quelques tours sans qu’il ne se passe grand-chose ».
« Je n’y ai pas cru tout de suite », Laurence Pithie
La grande bagarre s’est finalement initiée à un peu moins de trois tours du terme, dans l’enchaînement des deux courtes bosses du circuit. « On avait prévu d’être offensifs dans les derniers tours, et on a vraiment bien respecté le plan, expliquait Laurence Pithie. Je connais très bien Lewis depuis nos années Conti, et on savait que si on attaquait ensemble avec quelques coureurs, on pouvait avoir une bonne chance d’aller au bout. C’est donc ce qu’on a fait. On a bien travaillé avec les coureurs de la Cofidis, on a réussi à maintenir un écart pendant deux tours, mais ensuite certains mecs ont réussi à faire la jonction depuis le peloton, ce qui a changé un peu les choses ». « On était d’abord dix en tête, puis les plus forts sont restés devant, précisait Lewis. On n’était plus que cinq, mais on n’a jamais eu beaucoup d’avance sur le peloton ». Avec la meute aux trousses à l’entame de la dernière boucle de huit kilomètres, il a alors fallu faire un choix. « J’ai parlé avec Laurence pour savoir comment il se sentait, relatait Lewis. Il m’a dit qu’il se sentait très bien, alors j’ai fait un effort à bloc dans la dernière bosse pour que le peloton ne revienne pas ». « Lewis a fait un travail incroyable et a passé un relais « suicide » pour me donner une chance de gagner, saluait le Néo-Zélandais. C’était parfait. Son relais était assez long et costaud tout en prenant soin de ne pas me faire exploser. Cela a permis au groupe de maintenir une légère marge sur le reste du peloton. Je ne pouvais pas rêver meilleur coéquipier aujourd’hui ». À trois kilomètres du but, Laurence Pithie s’est ainsi retrouvé avec toute la responsabilité sur ses épaules, mais il n’a pas tremblé, malgré un groupe de tête un peu plus étoffé. « Il fallait courir juste pour espérer gagner, et c’est ce que les gars ont fait, soulignait Thierry. Cela compense toutes les fois où ils ont été trop généreux ».
« Je savais que c’était un final très rapide et que des écarts allaient se faire car tout le monde était très fatigué, reprenait Laurence. Je ne voulais pas voir la victoire s’échapper en laissant un coureur filer. Je savais que j’étais fort, donc je devais suivre les coups. Parfois, il faut faire les efforts pour espérer l’emporter. C’est ce que j’ai fait, et ça a fonctionné ». Attentif, Laurence Pithie a pu accompagner deux hommes sous la flamme rouge et prendre quelques petites longueurs d’avance en vue de la dernière ligne droite. « On a fait un écart, mais le coureur d’AG2R-Citroën s’est relevé et a laissé le trou sur celui de la TotalEnergies, racontait encore le Kiwi. Je savais alors que je devais le reprendre, et attaquer dans la foulée. Je ne savais pas qui était derrière, je savais juste que j’avais un petit avantage et que je devais faire l’effort à ce moment-là et donner tout ce que j’avais ». Après avoir enclenché son accélération à 600 mètres du but, Laurence Pithie a pris les rênes seul à 400 mètres et a donc poursuivi le plus long sprint de sa jeune carrière. « Je ne suis pas sûr d’être déjà allé aussi loin dans la douleur que dans ce dernier kilomètre, disait-il encore. Je devais juste baisser la tête et tout donner, en espérant résister. J’ai juste regardé l’écran géant à 100 mètres de la ligne et je pensais que ça n’allait pas le faire. Je voyais que des mecs revenaient avec beaucoup plus de vitesse. Je n’avais plus qu’à me dresser sur les pédales et tout lâcher jusqu’à la ligne. Quand j’ai franchi l’arrivée en tête, je n’y ai pas cru tout de suite. J’ai même jeté le vélo au cas où ».
« On méritait de gagner », Lewis Askey
C’est donc au terme d’un final palpitant, et d’une performance impressionnante, que l’ancien de la « Conti » a pu lever les bras pour célébrer son tout premier succès dans l’élite. « C’est incroyable, je n’arrive pas vraiment à décrire ce que je ressens, confiait l’intéressé dans la soirée. C’est vraiment génial de décrocher ma première victoire pro en compagnie de certains de mes meilleurs amis ». « Laurence a montré qu’il était le plus fort, ajoutait Lewis. On est vraiment tous contents, car on s’entend super bien et on méritait de gagner. Laurence est l’un de mes meilleurs amis, donc être devant, travailler ensemble et gagner de cette manière, c’est vraiment spécial. C’est top de finir la semaine comme ça ». Omniprésente ces derniers jours, la jeune garde de l’Équipe cycliste Groupama-FDJ est donc bel et bien parvenue à « mettre la balle au fond » ce dimanche, sans que cela ne souffre d’aucune contestation. « C’est une excellente semaine, qui heureusement se conclut par une victoire, car ils n’auraient vraiment pas été récompensés de leurs efforts si ça n’avait pas été le cas, assurait Thierry. C’est une belle récompense pour l’ensemble du groupe. Ça promet de très belles choses, c’est évident. Laurence se découvre et cette victoire va lui donner d’autres envies. Lewis tourne autour et on sait qu’il va être capable d’en claquer une prochainement. Une vraie dynamique se met en place et c’est très important. Nos jeunes ont gardé l’insouciance qu’ils avaient avec la Conti, cette façon de courir décomplexée et d’être à la bagarre. C’est primordial ».
Alors que Paul Penhoët a signé la quatorzième place ce dimanche, Laurence Pithie a lui pris les rênes du classement général individuel et des jeunes de la Coupe de France FDJ, tandis que la Groupama-FDJ occupe toujours la tête de celui par équipes. « L’équipe nous a montré beaucoup de confiance en nous faisant tous monter dans la WorldTour, et je crois qu’on démontre qu’on le mérite, concluait Laurence. Je vais profiter de cette victoire, mais ça donne forcément de l’appétit… »
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