Il faut le dire : nous sommes, quatre mois plus tard, restés dans les brumes de l’Angliru où Kenny Elissonde, dans la vingtième étape de la Vuelta, a marqué l’histoire du cyclisme. Lui, à quelques jours de sa première compétition de l’année, parle encore de l’Angliru mais surtout de ses prochains objectifs. Avec une belle assurance.

Kenny, le temps passe vite, le Tour Down Under approche. Comment te sens-tu ?

Je suis à Draguignan pour un stage de quelques jours avec mes équipiers qui partiront samedi à Adelaïde avec moi mais j’ai été un peu souffrant. J’ai chopé une gastro-entérite trois jours avant mon départ. J’ai réussi à faire la première grande sortie cette semaine mais j’ai eu un contre-coup. Maintenant, ça va mieux, j’ai réussi à rouler jeudi avec Jacques Decrion mais je ne sais pas vraiment dans quelle condition je serai en Australie. Je me dis que l’équipe pourra aussi compter pour le classement général sur Jussi Veikkanen qui a fait Top 10 il y a un an et sur Anthony Roux qui est en forme. Tout devrait se jouer, comme d’habitude le samedi dans la côte de Willunga qui représente sept minutes d’effort. Anthony y sera à son affaire et on verra, moi, comment je suis.

Il est évident qu’il est préférable d’avoir un pépin de santé maintenant qu’au printemps ?

C’est exactement ça. J’ai quelques échéances importantes cette saison et le Tour Down Under est seulement ma première course de l’année. Je vais avoir sensiblement le même programme que l’an dernier.

Quelles sont ces échéances ?

Tout d’abord l’enchainement Australie-Tour d’Oman parce que j‘ai besoin de la chaleur. A Oman, je compte aider Thibaut Pinot dans Green Mountain que je connais bien. Ensuite il y a le bloc Tour de Catalogne-Tour du Pays Basque qui sont deux courses difficiles me convenant bien. Être dans le dernier col avec Thibaut, c’est important pour un grimpeur comme moi. Puis, je disputerai le Tour de Romandie avant une première coupure.

Evidemment la prochaine Vuelta est le grand objectif de ta saison ?

Je refuse de le voir comme ça parce que la Vuelta est dans neuf mois et ne peut pas constituer la seule échéance de la saison. Finir mon premier Grand Tour m’a décomplexé. Je sais que je peux passer 21 jours de course en gagnant le vingtième jour. J’envisage la suite avec de la confiance. Je pense avoir progressé physiquement mais ça doit se traduire toute l’année, pas seulement en septembre. Mon grand objectif est de gagner en régularité et de répondre présent partout où on m’attend. Etre un bon coureur capable d’un coup d’éclat, ça ne suffit pas. Je préfère devenir une valeur sûre. Les deux premières années m’ont permis de me découvrir moi-même et de découvrir les courses. Maintenant je sais où je vais.

Tu as changé ta préparation hivernale ?

Non, ce n’était pas nécessaire. Avant d’être malade, j’ai vraiment bien roulé. Avec Yoann Offredo, mon copain d’entraînement nous sommes partis en Espagne pour bien préparer le stage de Pen Bron en décembre. Comme on dit dans le cyclisme, on a fait le fond de jante. Maintenant, il faut faire de l’intensité.

La saison 2013 a été très riche pour l’équipe FDJ.fr, comment envisages-tu 2014 pour le Trèfle ?

Il ne faut pas oublier que rien n’est écrit, que les saisons ne se ressemblent pas. Hormis dans le Tour, nous avons eu de la réussite avec nos sprinteurs qui ont gagné 20 courses, avec Thibaut Pinot qui a fait son deuxième Top 10 dans un Grand Tour en deux ans, avec un bon groupe de coureurs qui ont levé les bras mais rien n’est écrit d’avance. Marc Madiot, c’est normal, veut gagner plus de courses qu’en 2013 mais tout le monde, dans le peloton, travaille beaucoup pour gagner. Chaque jour, les 200 coureurs veulent gagner.

Le groupe que vous formez semble très serein ?

Oui il l’est, tout le monde tire vers le haut. A Pen Bron, tout le monde était dans le travail. Quand le copain d’à côté gagne une course, on se dit ‘’pourquoi pas moi ?’’. Je ne sais pas ce que ça va donner sur le terrain mais tout le monde est sérieux et impliqué. Maintenant, ma prudence vient de notre réussite en 2013. Par exemple, quand Alexandre Géniez sera échappé, je ne crois pas que nos adversaires lui laisseront beaucoup de liberté.

On est obligé d’en parler, quelle image te reste-t-il de l’Angliru ?

Le brouillard, la difficulté et le rêve parce que c’était une journée de rêve. Si le matin de cette étape, on m’avait dit que j’allais gagner, j’aurais répondu ‘’arrête de rêver’’… Aujourd’hui, je suis en 2014 de plein pied, je ne veux pas m’embourgeoiser par une victoire. Je vais m’en servir mais surtout pas passer mon temps à ressasser. Il me reste le plaisir de cette belle fin de saison et c’est agréable d’être sur la lancée.

Et obligé de parler de ta passion pour l’art, quelle exposition tu peux nous conseiller ?

Déjà, à Beaubourg, il y a toujours quelque chose de bien à voir. Sinon, j’admire vraiment le travail de Basquiat en Street Art. J’ai bien aimé l’exposition Braque au Petit Palais. Et je lis ‘’Mort à Crédit’’ de Céline qui est vraiment un bon livre. Je pars en Australie avec pas mal de bouquins. Là-bas, on a le temps… 

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