C’est un nouveau départ pour Rudy Molard. Victime d’une lourde chute et d’une sévère commotion cérébrale lors de sa reprise sur le Tour Down Under, le puncheur de 34 ans s’apprête à remettre un dossard, mardi, sur le Tour de Romandie. Le bout d’un tunnel infernal. Dans cet entretien, il se livre sur ses moments de fragilité, de désarroi, alerte, aussi, mais conserve pour autant un optimisme résolu.
Rudy, nous sommes aujourd’hui trois mois après ta chute. Comment vas-tu, physiquement et mentalement ?
Beaucoup mieux qu’il y a quelques semaines. Je sens que je sors enfin la tête de l’eau et que je peux envisager l’avenir avec plus d’optimisme. Physiquement, j’ai encore du travail pour revenir au top de ma forme, c’est certain, ayant passé un mois et demi sans rien faire. Il a fallu opérer une reprise progressive et gérer la tête, ce qui est différent d’une fracture. J’avais le feu vert, mais il était parfois clignotant, donc il fallait beaucoup s’écouter. Je pense qu’on a très bien géré avec le staff de l’équipe et notamment Julien [Pinot] et Jacky [Maillot]. Petit à petit, j’ai pu me reconstruire. Je pense que je suis sur la bonne voie.
« J’étais dans un monde parallèle »
Revenons sur cet accident, et de l’amnésie qui l’a accompagnée. Comment as-tu vécu ces premières heures ?
Quand je me suis réveillé à l’hôpital, ça parlait anglais, je ne savais pas du tout où j’étais. Puis j’ai vu que j’étais en tenue de vélo, donc je me suis rendu compte que j’étais en course, et je me suis souvenu que j’étais en Australie. Quand j’ai enfin réellement repris mes esprits, la première chose à laquelle j’ai pensé c’est : « p***, je suis là ». Je me suis dit que j’aurais pu ne jamais me réveiller. Le plus dur a été de me rendre compte que ça aurait pu être plus grave, et que le pire pouvait arriver. Ça m’a alarmé. Je n’ai jamais craint le pire durant ma carrière, mais là, j’ai eu peur. Puis, j’ai rapidement voulu comprendre ce qu’il s’était passé. Quand on a une amnésie de près d’une heure, on a envie de savoir. C’est étrange de ne pas se rappeler d’un moment de sa journée. Je me suis dit que ça allait peut-être me revenir en regardant les photos, mais non, rien n’y faisait. Je ne me reconnaissais pas sur les photos, j’avais l’impression que ça ne s’était pas passé comme ça, même que ça n’était pas arrivé. À l’hôpital, on m’a dit que si je ne m’en rappelais pas les heures suivantes, je ne m’en rappellerais jamais. Et ce n’est effectivement jamais revenu. Ce qui est fou, c’est que j’étais conscient sur le chemin de l’hôpital, mais je ne me rappelle de rien. C’est vraiment étrange.
Comment te sentais-tu à l’hôpital ?
Je n’étais plus dans mon état normal, j’étais tellement dans les vapes… Je voyais que ça tournait autour de moi, il y avait beaucoup d’agitation. J’avais l’impression que le monde allait très vite. Le premier diagnostic dont je me rappelle est le soir-même, assez tard. On m’a dit qu’il n’y avait pas de fracture ou d’hémorragie au niveau du cerveau, et que l’essentiel était préservé. À part ça, j’étais tellement drogué que je ne me rendais pas compte de la situation… J’étais sous Fentanyl, qui équivaut à 100 fois la morphine. Je ne sais même pas si c’est autorisé en France. Je n’avais mal nulle part. Je ne souffrais même pas de la chute car je ne m’en rappelais pas. J’étais dans un monde parallèle. On m’a donc dit que je souffrais d’une grosse commotion cérébrale. Je n’en avais jamais été victime, et pour moi, j’étais sur le vélo la semaine d’après. J’avais certes un mal de tête, bien atténué par les anti-douleurs, mais j’étais dans le déni complet. Je me suis juste souvenu qu’on avait eu une réunion en stage sur le sujet, et Jacky et Stéphane [Desbuisson] m’ont dit tout de suite de limiter les écrans, de rester dans le noir au maximum. Les gens ne vont peut-être pas le croire, mais je ne me sentais pas si mal à l’hôpital…
As-tu souffert d’autres blessures ?
J’avais de nombreuses plaies, et une anesthésie générale a été nécessaire pour tout nettoyer. Mais ça, j’en ai l’habitude, je n’étais pas inquiet. En revanche, j’avais un énorme hématome à la cuisse gauche qui m’a handicapé pendant très longtemps. J’avais du mal à marcher correctement, à rester sur ma jambe gauche quand je me suis levé la première fois. Au début, j’ai aussi eu très peur pour mon visage car je voyais qu’on me regardait étrangement. Un jour, on m’a parlé de chirurgie plastique. Quand j’ai entendu ces mots-là, j’ai commencé à paniquer car je ne m’étais encore pas vu. On a mis du temps à me prendre en photo et à me montrer. J’étais vraiment inquiet car je sentais que ça me brûlait de partout. Je craignais d’avoir des séquelles à vie. J’ai d’ailleurs encore quelques marques qui je pense ne partiront pas.
« Ça alternait entre lendemain de soirée et état d’ébriété »
Tu es resté en Australie avec le reste du groupe jusqu’au bout. Comment s’est passé le reste du séjour ?
Ça n’allait pas si mal, même si je me sentais très fatigué et que la lumière du jour me faisait mal à la tête, tout comme les écrans. Mais j’étais dans un état de somnolence, je faisais des siestes constamment. J’avais à peu près une à deux heures d’autonomie. Je ne faisais rien et je n’avais envie de penser à rien. La journée passait, et le soir ça n’allait pas si mal car je n’avais rien fait à part me reposer. Les autres se sont peut-être dit : « ça a l’air d’aller Rudy ». En réalité, c’était un trompe-l’œil.
À quel moment as-tu réalisé que cette commotion cérébrale était plus sérieuse que tu ne l’imaginais ?
C’est à mon retour en France que j’ai compris que ça allait être long. De jour en jour, mon état s’empirait. Je ne voyais aucune amélioration. Avec Jacky, on a vite pris rendez-vous avec un spécialiste à Monaco, mais le plus difficile, c’est que personne ne pouvait me donner un délai. J’ai eu une semaine de léger mieux, mais la suivante, j’étais de retour en arrière, et même pire qu’avant. Cela faisait déjà quatre semaines. J’ai vraiment minimisé ma blessure au départ, puis j’étais dans le déni complet de ce qui m’arrivait. Ensuite, il y a eu la phase d’acceptation, celle de se dire que tout le début de saison allait être manqué. Ça s’est fait étape par étape, et ce n’est que lorsque j’ai accepté ma situation et laissé le temps au temps que c’est allé mieux.
Lorsque tu dis que ton état empirait, comment cela se manifestait-il ?
C’était un enfer. En fait, j’avais l’impression d’être bourré tout le temps. Ça alternait entre lendemain de soirée et état d’ébriété. J’avais la tête qui tournait, des vertiges, des pertes d’équilibre, la nausée, en continu et toute la journée. Vraiment à se taper la tête contre les murs… Dès que je me levais et que je marchais un peu, il fallait que je me tienne à la table car j’avais du mal à tenir debout. Dès que je fermais les yeux, je tombais. Là où je me sentais le mieux, c’était dans le noir, car la lumière du jour ne me convenait pas. D’ailleurs, je ne voyais plus rien. Un jour, j’ai voulu changer la taille d’un bracelet. Je n’y arrivais pas. J’ai demandé à ma copine, qui l’a fait en deux secondes… Je me suis dit que c’était plus grave que prévu. J’ai dû aller chez l’ophtalmo, et j’ai des lunettes depuis. Ces petites étapes m’ont fait prendre conscience que c’était sérieux. Souvent, j’avais aussi des absences. Quand j’allais manger chez des amis, parfois je n’étais plus là pendant le repas. Mon cerveau se déconnectait du moment présent. J’étais ailleurs. Le cerveau partait dans des délires, des semi-hallucinations. Tu ne contrôles plus rien. L’imaginaire et le subconscient travaillent sans cesse. Cette période a duré deux-trois semaines. C’était interminable.
« Tant que les choses ne t’arrivent pas, tu le comprends mal »
En quoi a consisté ta convalescence et comment soigne-t-on une commotion cérébrale ?
Le premier point important est de ne pas s’isoler, beaucoup échanger, discuter et avoir un gros suivi psychologique. Parler de ce qui m’arrivait m’a fait beaucoup de bien. La deuxième chose qui m’a beaucoup aidé est la kinésithérapie vestibulaire. J’ai eu de gros problème au niveau de l’oreille interne suite à la chute. Il a fallu faire des séances de kiné pour soigner les vertiges et pertes d’équilibres. C’était primordial. Ensuite, je devais me reposer constamment. Dès que je me sentais un peu fatigué, je devais me coucher et ne pas forcer. Le quatrième axe, enfin, c’est la patience. Il n’y a pas grand-chose à faire en termes de traitement, et c’est le plus frustrant… Une fois, je suis parti rouler, j’ai fait quinze minutes de descente, et le simple fait de voir les paysages défiler sur les côtés m’a complètement déstabilisé. Je suis arrivé en bas, j’étais ailleurs, je n’arrivais plus trop à rouler droit. J’ai dû m’arrêter sur un muret, me reposer, et je suis rentré. Ce sont des choses bêtes, auxquelles on ne pense même pas habituellement. Le pire, c’étaient peut-être les ombres des arbres sur la route. Ça me perturbait énormément et ça créait des vertiges.
As-tu la sensation que la commotion cérébrale est parfois sous-estimée ?
Clairement, car elle ne se voit pas. Quand des amis passaient, je sortais du lit, on buvait un coup et on discutait. Je n’étais pas très bien, mais ça ne se voyait pas de l’extérieur. Tant que les choses ne t’arrivent pas, tu le comprends mal. On parle des commotions depuis quelque temps, mais j’avoue ne l’avoir jamais pris au sérieux moi-même. C’est quelque chose dont on ne parle jamais. Pour moi, quand quelqu’un tombait et souffrait d’une commotion, il était un peu patraque mais tout était de retour dans l’ordre quelques jours plus tard. Maintenant que ça m’est arrivé, j’ai vraiment envie de partager tout cela pour les gens à qui ça arrivera malheureusement dans le futur. C’est une période qui est beaucoup plus difficile qu’on ne le croit, il y a peu d’études et de choses concrètes sur le sujet. Or c’est important. D’ailleurs, vu que j’avais du mal avec les écrans, j’écoutais des podcasts sur le sujet pour en savoir plus. Cela me permettait aussi de fermer les yeux et de me reposer, ça me faisait du bien. J’ai écouté des expériences de rugbymen, de judokas. L’un d’entre eux a dit quelque chose qui m’est resté. Il était tombé lors d’un combat, sa femme lui avait demandé des nouvelles et il avait répondu qu’il souffrait d’une commotion. Sa femme lui avait dit : « ça va si c’est juste une commotion ». Puis il racontait que c’était en fait la pire blessure de sa carrière. Je ne me sentais pas seul.
Ressens-tu des conséquences encore aujourd’hui ?
C’est surtout la vue au quotidien qui me gêne. Je sens que ce n’est pas revenu à la normale sans les lunettes. Quand je ne les mets pas, je fatigue vite au niveau des yeux et ça m’agace un peu. Ça prendra un petit peu plus de temps, mais je pense que je les garderai à vie pour lire et regarder la télé. Je sens aussi que j’ai besoin de bien dormir la nuit. Dès que je déborde un peu, je suis vite fatigué le lendemain. Sinon, globalement, je ne ressens plus rien.
« Quand je voyais quelqu’un m’appeler, j’étais vraiment content »
Psychologiquement, le temps t’est-il paru long depuis la chute ?
Forcément, oui. D’autant que j’avais axé ma préparation sur le début de saison cette année. C’est surtout ça qui a été difficile à accepter ; voir tout le travail hivernal partir en fumée. En Australie, je sentais que ça répondait vraiment bien. Alors voir tout s’arrêter d’un coup et ne pas pouvoir faire les courses que j’avais préparé, c’était dur à digérer. Et je savais que j’allais devoir repartir de zéro. C’est plus dur à vivre qu’une chute en fin de saison. En dix ans c’est par exemple la première fois que je manquais les Ardennaises. Quand je regardais les courses à la télé, je ne me sentais pas à ma place. Je me disais que ma place n’était pas dans le canapé, elle était avec les copains sur le vélo.
Quelle a été ta relation avec l’équipe durant tout ce temps ?
D’habitude, je ne suis pas forcément quelqu’un qui a besoin de soutien, mais là j’en ai demandé. Jacky m’a vraiment pris en main tout de suite, il m’a envoyé vers les meilleurs spécialistes afin qu’on ne passe à côté de rien. Ensuite, j’ai eu un gros suivi psychologique avec Jean-Luc Tournier et ça m’a fait beaucoup de bien. J’étais aussi en relation régulière avec Julien, mon entraîneur, qui prenait des nouvelles et qui était toujours là. J’ai pu m’appuyer sur lui. Puis j’ai eu des appels de Marc, David Le Bourdiec, certains directeurs sportifs. Philippe Mauduit a d’ailleurs fait un détour pour me rendre visite après une course. La plupart des coureurs et membres du staff venaient aux nouvelles. C’est une période où chaque soutien et chaque appel me faisait beaucoup de bien. Souvent, on a envie d’être tranquille entre deux courses. Dans ce cas précis, c’était l’inverse. Quand je voyais quelqu’un m’appeler, j’étais vraiment content.
Physiquement, comment s’est déroulé le processus de remise en forme ?
Un jour, je me suis dit que j’allais reprendre les pompes. J’en ai fait deux. Impossible de faire la troisième. Je me suis dit : « oula, il va y avoir beaucoup de travail ». Je n’avais plus du tout de tonus musculaire, plus rien. Je me suis dit que je devais me reconstruire petit à petit. Je me suis inspiré de beaucoup de sportifs qui ont eu des blessures, mais dont la coupure a été ultra bénéfique et suite à laquelle ils sont revenus plus forts. Mentalement, je me suis beaucoup appuyé là-dessus. Ça a commencé à aller mieux à la mi-mars, donc après deux mois. Aujourd’hui, je pense être à 80% de mes capacités. J’ai passé le plus dur. Il y a une semaine, j’ai eu mes premières petites sensations à l’entraînement. Je sentais que je progressais, alors que lors des premières intensités, c’était vraiment dur. Dans ces moments-là, je pensais à ce que j’avais vécu et je ne voulais vraiment pas lâcher. J’arrivais à aller un peu plus loin rien qu’à l’entraînement. Je sens que j’ai une grosse fraîcheur mentale pour faire des efforts difficiles et j’espère que ça m’aidera en course.
« On attend quoi ? Qu’il y ait encore un drame ? »
On t’a aussi vu t’exprimer sur les récentes chutes. Ça te tenait d’autant plus à cœur après ton propre accident ?
Je me suis simplement rendu compte que lorsque tu es sur le vélo, tu as la vie de tes adversaires entre les mains. Et beaucoup n’en ont pas conscience. Comme j’avais du temps, j’ai pu regarder la plupart des courses à la télévision, et à chaque fois, je ne voyais que des grosses chutes. Je ne prenais plus de plaisir à suivre les attaques et à ressentir l’adrénaline du final. J’avais juste peur que les mecs se foutent encore en l’air. Personnellement, depuis un an, j’ai subi cinq chutes qui ne sont pas de mon fait. L’an passé, ça a vraiment entaché ma saison et m’a empêché de faire des résultats. Je suis reparti cette année en me disant que ce serait différent, et « bam ». Première course, première chute, out trois mois. J’en ai eu un peu marre d’enchaîner les grosses chutes sans en être responsable. Au bout d’un moment, j’ai eu envie de m’exprimer là-dessus.
Tu as notamment soulevé la responsabilité des coureurs eux-mêmes…
Oui, car on dit souvent que c’est à cause de l’organisateur, de ceci ou de cela. Cette année, au Pays Basque, il y avait beaucoup moins de petites routes, et c’est tombé aussi, voire plus. Je pense que les organisateurs essaient de faire des efforts, et il faut certainement encore en faire, mais les principaux responsables restent selon moi les coureurs et leur vigilance. Maintenant, qu’est-ce qui pousse les coureurs à prendre autant de risques ? Il y a beaucoup de paramètres : le matériel va plus vite ; avec les freins à disques, c’est à celui qui freinera le dernier ; les oreillettes, et la pression pour courir en équipe et pour se placer ; les mecs qui parlent dans la radio à 50km/h en lâchant une main ; les gars qui se retournent dans le final et font des vagues ; le mec qui lance son bidon qui revient sur la route, comme sur l’Amstel récemment. Il y a plein de comportements dangereux qui doivent être sanctionnés. Il a fallu attendre que les leaders tombent pour qu’on en parle sérieusement. C’est désespérant, mais si ça peut au moins être un déclic… Quand les gros sponsors mettent des millions sur un mec qui se retrouve out 3-4 mois, ce n’est pas bon pour notre sport. Dans l’histoire du sport, c’est à chaque drame que la sécurité a évolué. On attend quoi ? Qu’il y en ait encore un ? On roule à des vitesses folles en petit tissu. Quand on tombe, c’est comme si tu prenais ta voiture en short/t-shirt, à 60 km/h, que tu ouvrais la porte et que tu sautais. L’oreillette, c’est comme si tu étais au téléphone au volant en train de coller la voiture devant toi. Quand on te parle à l’oreillette à 60 km/h et qu’il faut te concentrer sur ce qu’on te dit et en même temps sur la roue du coureur devant toi, et cela des heures durant, je pense que ça peut en faire perdre la lucidité à certains.
Aimerais-tu que plus de coureurs s’expriment sur le sujet ?
Ce qui m’a réjoui, c’est d’être soutenu dans ma prise de parole. J’ai reçu beaucoup de messages, y compris de coureurs. Je pense que ce malheureux accident a permis une libération de la parole des coureurs sur un sujet sur lequel il est toujours difficile de prendre parti ou position. Je pense que tous les coureurs vont dans la même direction. S’il y a une prise de conscience générale, que les médias s’en mêlent et que les instances réagissent, je pense qu’on peut arriver à quelque chose. On n’arrivera jamais à zéro chute, mais je pense que quelques actions doivent être menées pour les réduire et pour notre sécurité. On prend trop de risques. Beaucoup trop. Aucun sport n’en prend autant.
« Cette longue période à la maison m’a vraiment régénéré »
Tout cela a-t-il remis en question ta volonté de continuer encore longtemps dans le vélo ?
Non. Justement, j’ai envie de me battre pour le sport que j’aime, j’ai envie qu’il évolue. J’ai envie que dans quelques années, on se dise : « p*** en 2024, on roulait comme ça, tu imagines ? » Je ne veux pas faire le vieux con en disant que c’était mieux avant. Je vais retourner en course, j’ai envie de retrouver cette adrénaline du final. Peut-être qu’avec l’âge et l’expérience, on prend un petit peu plus de recul, mais j’ai toujours envie d’aller me battre et je pense que cette longue période de repos va au contraire encore prolonger un peu ma motivation.
À quoi tu t’attends sur le Tour de Romandie, qui fera office de reprise mardi ?
Quand je vais mettre mon dossard sur le maillot, ce sera spécial. Je n’ai pas non plus été blessé un an, c’est vrai mais il y a aura quand même de l’émotion. J’ai un peu d’appréhension sur mon niveau, c’est certain, car je n’ai fait que de l’entraînement. J’espère avoir le niveau suffisant pour suivre et ne pas être en difficulté trop tôt, mais je ne m’attends pas à peser sur la course. C’est une épreuve WorldTour, donc c’est assez difficile pour une reprise, mais il y aura du travail à faire pour David et Lenny. Je vais essayer de vite reprendre les automatismes, retrouver la vitesse du peloton et son environnement. C’était peut-être un tout petit peu prématuré de reprendre en Romandie vis-à-vis de ma forme, mais je voulais vraiment reprendre dès que j’en avais l’opportunité et les capacités minimales. Psychologiquement, ça m’a fait du bien, il y a quelques semaines, de me projeter sur une reprise en Romandie.
Comment envisages-tu le reste de la saison ?
C’est dur à dire aujourd’hui. Quand j’étais tombé en 2021, j’avais repris en Catalogne et je n’avais pas fini la course. Mais derrière, j’avais très bien marché et notamment fait huitième de la Flèche Wallonne. Quand j’y repense, j’étais revenu plus fort, donc j’espère retrouver vite un bon niveau. C’est certes un peu différent car j’ai été touché au cerveau cette fois, mais je sens que cette longue période à la maison m’a vraiment régénéré. Je sens aussi que sur le vélo, j’ai moins de fatigue profonde musculaire. Ce sont des signaux optimistes, et le mental compte beaucoup. Je pense que dans l’effort, je réussirai à aller plus loin et j’espère que ça se transformera en résultats. Il me faudra quelques courses, mais j’espère qu’avec le Tour de Romandie et quelques-unes derrière, je pourrai retrouver un bon niveau d’ici fin mai-début juin, notamment en vue des championnats de France. C’est peut-être un premier point de passage. Il y a aussi le Tour. Il arrive à Nice, et tout le final est dans ma région. J’ai cet objectif depuis cet hiver et il n’est pas perdu. Avec ce qui m’est arrivé, je peux peut-être me surprendre au niveau des sensations. Je garde espoir de retrouver mes pleines capacités.
1 commentaire
Colonnier Emmanuel
Le 24 avril 2024 à 09:17
Merci pour ce témoignage fort et utile. Finalement, je n’avais aucune idée de ce qu’est une commotion cérébrale…
Je souhaite évidement le meilleur à Rudy et à tous les coureurs momentanément arrêtés dans le sport que l’on aime. Ta reprise, hier, au prologue du Romandie est un très beau résultat.
Bonne route ;o)
Emmanuel
PS : je ne sais pas si mon commentaire sera publié mais j’aimerai bien qu’il soit transmit à ce coureur franc, talentueux et attachant.