Il a refait le coup. Un an après son premier couronnement sur Paris-Tours, au terme d’un superbe numéro, Arnaud Démare a remis ça sur la Classique des feuilles mortes ce dimanche pour clôturer sa saison de la plus belle des manières. Au bout de l’Avenue de Grammont, et au terme d’une course d’équipe exemplaire, l’ancien champion de France a cette fois-ci disposé d’un petit peloton au sprint pour s’octroyer son septième bouquet de la saison. Il a par la même occasion porté le compteur de l’Équipe cycliste Groupama-FDJ à dix-neuf victoires, et ce à une semaine du terme officiel de la saison sur le Chrono des Nations.

Alors qu’une partie du peloton a clôturé sa saison samedi sur les rives du lac de Côme, une autre s’apprêtait à faire de même ce dimanche sur les chemins de vignes de la Touraine. À l’instar de ces dernières années, la 116ème édition de Paris-Tours comprenait des sentiers en plus des habituelles côtes. C’est d’ailleurs sur un tracé relativement similaire qu’Arnaud Démare s’était brillamment imposé l’an passé, à l’issue d’une course offensive. En forme, le Picard se présentait donc au départ en tant que tenant du titre et naturellement avec une grosse pancarte sur le dos. Mais aussi avec une belle escouade. « On savait qu’on avait de grosses chances de gagner et un gros collectif, disait Frédéric Guesdon. On avait également le vainqueur sortant qui était hyper motivé ». Dans un premier temps, c’est une échappée de cinq hommes composée de Jonas Abrahamsen (UnoX), Romain Cardis (Auber-St Michel 93), Clément Carisey (GO Sport-Roubaix Lille Métropole), Alexis Gougeard (B&B Hôtels-KTM) et Maël Guégan (UC Nantes Atlantiques) qui a animé la journée. Le peloton a pour sa part laissé l’écart grimpé jusqu’à six minutes, peu après la mi-parcours. « La course était vraiment tranquille au début, témoignait Stefan Küng. Il n’y avait pas beaucoup de vent et pas trop de dangers. Il y a quand même eu quelques chutes et il fallait passer à travers ». L’une d’entre elles a malheureusement écarté Lewis Askey à soixante-dix bornes du but, juste avant d’entrer sur le premier chemin de vignes. La course a dès lors redémarré et Olivier Le Gac s’est lancé dans l’action au sein d’un groupe de chasse. « Mon rôle était d’être vigilant dès les premiers chemins, indiquait le Breton. On sait qu’il y a souvent un groupe qui sort assez tôt et qui va loin ici. On voulait garder Stefan et Nono davantage pour le final ».

« La présence d’Olivier devant nous a été très utile », Frédéric Guesdon

Au fil des kilomètres, Olivier Le Gac s’est rapproché de l’échappée matinale en compagnie de Clément Russo, Alex Kirsch, Kim Heiduk et Sam Bennett. À l’arrière, ses coéquipiers s’attachaient à le couvrir du mieux possible. « On voulait être présents dès le début pour ne pas se faire piéger et devoir rouler, expliquait Stefan. Collectivement, on a fait une super course. Avec Jake et Kevin, on a accompagné les coups, ce qui a permis à Arnaud d’économiser ses forces ». « On a également accompagné les contres pour avoir un coup d’avance, car on sait qu’il peut se passer beaucoup de choses sur les chemins », confirmait Frédéric Guesdon. Le peloton a ainsi longtemps navigué à une petite minute du groupe d’Olivier Le Gac, qui a mis un certain temps à revenir sur les premiers fuyards. « J’avais déjà des crampes à quarante kilomètres de l’arrivée, donc j’en ai fait moins que mes collègues d’échappée, confiait encore Olivier. Je n’avais pas envie de rouler à fond pour emmener les autres, et coincer dans le final. Finalement, dans la dernière bosse, j’avais encore un peu d’énergie pour accompagner les attaques ». Dans cette ultime côte, le Brestois a ainsi suivi Heiduk et Kirsch, et a établi la jonction avec Abrahamsen, dernier rescapé de l’échappée, à tout juste sept kilomètres de la ligne. Derrière, c’est un peloton encore fourni d’une quarantaine d’hommes qui s’est lancé à leur poursuite. « Ça faisait vraiment mal dans les chemins, mais ça temporisait à chaque fois sur les portions de route et ça revenait, expliquait Arnaud. Je pense que c’est dû au fait que les bonnes équipes étaient dans l’échappée. Ça faisait les affaires de tout le monde. On ne savait pas trop quoi faire non plus derrière. On ne voulait pas rouler sur Olivier, on voulait lui faire confiance ».

En tête, le Breton s’est également retrouvé dans une position indécise, et avec un matelas d’à peine quinze secondes à cinq bornes du terme. « J’espérais jouer la gagne, j’aurais bien aimé faire un petit résultat, assurait-il. J’avais confiance en ma petite pointe de vitesse, mais en ayant Arnaud derrière, j’avais un peu le cul entre deux chaises. Je n’ai pas complètement cru en mes chances. Je me suis dit que j’allais jouer avec mes collègues d’échappée, en bluffant un peu pour en garder pour le sprint ». Toutefois, le peloton a lui clairement mis en marche par l’intermédiaire de formations encore surreprésentées. « Les autres ont dû ramener sur Olivier, notait Stefan. Ça nous a permis de garder un peu nos forces, surtout que j’étais le dernier coureur avec Arnaud ». « C’est dans ces derniers kilomètres que la présence d’Olivier devant nous a été très utile », soulignait encore Frédéric. Au bout du compte, le paquet n’a fait qu’une bouchée du quatuor de tête, qui a été absorbé à 1500 mètres du terme. C’est donc un sprint en peloton réduit qui s’est profilé sur la longue Avenue de Grammont. « Un sprint après 200 kilomètres et une course d’usure, ce n’est pas la même chose qu’après une course tranquille, insistait Stefan. J’avais confiance en Arnaud, et il avait confiance en moi. Quand Trek-Segafredo n’a pas relancé après le dernier virage (750m), j’ai dû commencer mon effort et je me suis dit qu’il fallait que je tienne jusqu’à 200 mètres ». « Je sais qu’il vaut mieux être devant et ne pas mettre de coup de frein plutôt que d’être derrière et chercher à passer, ajoutait le Picard, alors situé en deuxième position. J’ai fait confiance à Stefan. Je sais qu’il est très résistant et qu’il pouvait faire un sprint long. Je l’ai joué un peu décollé en sachant que ça aurait pu lancer plus tôt derrière ».

« S’il fallait en gagner une, c’était celle-ci », Arnaud Démare

Quand l’emballage s’est véritablement lancé, à environ 250 mètres de la ligne, l’ancien champion de France a alors bondi, rapidement pris les rênes, et maintenu sa première position jusqu’à la ligne d’arrivée. Il s’est ainsi imposé de manière assez nette face à Sam Bennett et pu lâcher un hurlement de bonheur. « J’ai sorti un super sprint pour gagner, commentait Arnaud dans un large sourire. Le final me semblait long. J’avais vraiment peur de me faire sauter après mes récentes sept places de deuxième. Je me suis donné jusqu’au bout du bout, et j’arrive à l’emporter. S’il fallait en gagner une, c’était celle-ci. Je suis vraiment content de finir par une victoire. C’est un scénario complètement différent de celui de l’an passé et ce n’est pas du tout ce à quoi je m’attendais ce matin. Ça confirme aussi que je suis capable de jouer sur plusieurs tableaux. On était attendu, et on a fait une course d’équipe formidable. Ça clôture la saison parfaitement. C’est super ». « On prend le départ de toutes les épreuves pour gagner, mais ça fait toujours plaisir de gagner la dernière, confirmait Frédéric. C’est la victoire d’Arnaud, mais c’est surtout une victoire collective. C’était d’ailleurs un peu la tactique. Arnaud n’était pas le seul coureur protégé, tout le monde avait un peu sa chance, on faisait confiance à toute l’équipe ». Olivier Le Gac en a été l’exemple. « Il y a forcément un peu de déception d’un point de vue personnel, mais Nono a gagné et on était là pour ça, donc c’est l’essentiel », soutenait le Breton. « Arnaud a très bien fini le travail, concluait son poisson-pilote du jour Stefan Küng. Ça fait du bien de gagner la dernière course en ligne. On a fait une campagne extraordinaire sur les courses d’un jour, on a tout le temps été présents. On a une équipe jeune et ceux de la Conti arrivent ! J’ai déjà hâte de faire les Classiques avec eux l’an prochain ». Le Suisse conclura lui sa saison dimanche prochain sur le Chrono des Nations en tentant d’apporter le vingtième succès de l’année à la Groupama-FDJ.

1 commentaire

Jac34

Jac34

Répondre

Le 10 octobre 2022 à 09:42

Toujours un régal pour les yeux de voir naviguer Arnaud au sein du peloton. Une bien belle équipe, pour une belle saison.
Bravo à tous y compris à ceux dont on ne parle jamais, l’encadrement.