Thibaut Pinot dauphin, les armes à la main

Thibaut Pinot, son équipe et ses fans sont passés par toutes les émotions ce dimanche. Parti en position de leader du Critérium du Dauphiné, en raison du retrait de Primoz Roglic le matin-même, le leader de l’Équipe cycliste Groupama-FDJ s’est retrouvé la cible de toutes les attaques, et ce dès le départ. Le grimpeur franc-comtois est malgré tout apparu en maîtrise dans la première partie de course avant d’être distancé à 30 kilomètres de l’arrivée. Il s’est ensuite battu, vaillamment, pour conserver sa place sur le podium du général. Il termine deuxième de l’épreuve, à 29 secondes de Dani Martinez, et peut quoiqu’il en soit se projeter sereinement vers le Tour de France.

Ce Critérium du Dauphiné 2020 aura été renversant jusqu’au bout. Ce dimanche, à quelques minutes du départ de la cinquième et dernière étape, une première nouvelle bousculait déjà tous les pronostics : le maillot jaune Primoz Roglic était annoncé non-partant suite à sa chute de la veille. De fait, Thibaut Pinot se retrouvait provisoirement leader de l’épreuve. Sans en porter la tunique, il en avait néanmoins bel et bien le statut, et dans cette étape de 153 kilomètres avec huit difficultés au programme, cela annonçait une sacrée bagarre. Ça n’a pas manqué, d’entrée de jeu. « La journée est partie sur les chapeaux de roue, avec un peloton complètement explosé au bout de vingt-cinq kilomètres de course et des groupes de coureurs déjà séparés par 30 secondes voire une minute, relatait Philippe Mauduit. Dans le Col de Romme, c’était déjà du chacun pour soi. Cela a lancé la journée de manière assez compliquée, mais on s’y attendait. C’était presque inévitable vu le parcours proposé ».

« Je ne voulais vraiment pas lâcher », Thibaut Pinot

Mis sous pression d’emblée par ses rivaux au classement général, Thibaut Pinot a dû s’employer sérieusement pendant une bonne heure et demie. « Je me suis fait attaquer dès le deuxième kilomètre, expliquait le leader de la Groupama-FDJ. À partir de là, je n’avais pas d’autres choix que d’être dans l’échappée. Puis, dans l’enchaînement des cols de Romme et de la Colombière, ça a été attaque sur attaque ». « La consigne pour Thibaut était d’essayer de favoriser le regroupement de l’équipe après les premières difficultés, poursuivait Philippe, mais le départ a été tellement dur qu’on a jamais réussi à se rassembler. Il y avait trop d’écarts entre les différents groupes et cela s’est résumé très tôt à un match entre leaders. Il n’y avait pratiquement pas d’équipiers devant, à part chez Jumbo-Visma. Les autres étaient soit esseulés soit avec un équipier maximum ». Thibaut lui-même a retrouvé un soutien dans le Col de la Colombière en la personne de Sébastien Reichenbach, pendant qu’un duo Pavel Sivakov-Julian Alaphilippe prenait seul les commandes de la course.

Dès lors, le champion de Suisse ainsi que la Jumbo-Visma ont remis un peu d’ordre dans le groupe de favoris, déjà réduit à une quinzaine d’hommes mais sans Mikel Landa ni Nairo Quintana. L’écart s’est même réduit à une minute avec les hommes de tête à l’approche de la côte de Domancy, à trente kilomètres de l’arrivée. C’est alors que certains favoris, Tadej Pogacar et Dani Martinez en tête, sont passés à l’offensive, sans que Thibaut Pinot ne soit en mesure de répondre. « Je n’étais pas dans une super journée, particulièrement à la fin, commentait l’intéressé à l’arrivée. Lorsque j’ai voulu accélérer, ça n’a pas répondu. Quand je les ai vus partir, j’ai vraiment pris un coup sur la tête. J’ai mis un moment avant de me reconcentrer, mais je ne voulais vraiment pas lâcher. Seb avait fait un super travail toute la journée, Julian [Alaphilippe] m’a donné un bon relais et tout le monde m’a encouragé. Ça m’a vraiment boosté et je ne voulais pas lâcher pour eux ».

« Thibaut est réellement revenu à son meilleur niveau », Philippe Mauduit

Assez rapidement relégué à une minute de Pogacar, Martinez mais aussi Sepp Kuss, Thibaut Pinot a laissé passer l’orage avant de retrouver de la vigueur dans les vingt derniers kilomètres afin de lutter pour le podium du général, voire même pour la victoire. « Il a vraiment montré qu’il avait un gros mental, qu’il était capable de se battre même dans la difficulté, soulignait Philippe. Mais on n’avait pas de doute-là dessus, on sait que ça fait partie de ses qualités et de sa force ». Un temps revenu à une douzaine de secondes de la victoire finale, le grimpeur franc-comtois a finalement cédé du terrain dans les derniers kilomètres, franchissant la ligne en septième position, à une minute de Sepp Kuss et à trente-cinq secondes de Dani Martinez. Insuffisant pour conserver le leadership, mais assez pour arracher la deuxième place finale du Critérium du Dauphiné. « Il y a quand même de la déception ce soir mais j’ai fait avec les moyens du jour, ajoutait Thibaut. J’ai vraiment fini au mental en pensant à tout ce qu’on avait fait cette semaine ».

« Ce soir, il y a un mélange de déception et de satisfaction, concluait Philippe. Forcément, quand tu passes si près de la victoire, tu ne peux qu’être déçu. Cela étant dit, il y aussi du positif. Nous n’avions pas fixé d’objectifs de résultats sur ce Dauphiné et je pense que tout le monde aurait signé pour une deuxième place en début de semaine. Il y avait un plateau de Tour de France sur ce Dauphiné et on a vu que Thibaut faisait jeu égal avec les meilleurs. Cela fait partie des choses qu’il faut retenir. Il est réellement revenu à son meilleur niveau et c’est intéressant. Il est bien dans les temps de passage pour sa préparation au Tour de France ». « C’est certainement de bon augure, mais ce que je cherchais, c’était la victoire, ponctuait Thibaut. Cette semaine, je pensais surtout au Dauphiné, pas tellement au Tour. C’est dommage mais les jambes sont là et c’est le principal. Maintenant, il va falloir bien se reposer avant le départ du Tour car ça a été une semaine vraiment très dure et beaucoup de coureurs sont très fatigués ce soir ».