« L’ambiance de l’équipe était fantastique ! ». Nacer Bouhanni est sur son petit nuage. Le sprinteur du Trèfle a bouclé son premier Grand Tour et revient les bras pleins de cadeaux, trois victoires d’étape, le maillot rouge du classement par points, un statut de leader évident et des souvenirs, beaucoup de bons souvenirs.
Nacer, tu as fait des merveilles dans le Tour d’Italie mais tout le monde se souvient surtout de ta première victoire d’étape à Bari ?
Oui, cette victoire compte beaucoup. S’il avait été possible de demander aux directeurs sportifs, dans le final, si je pouvais gagner, 95% d’entre eux auraient dit non. A 10 kilomètres de la fin, j’ai cassé les deux roues et j’ai dû attendre parce que la voiture de mon directeur sportif était loin derrière. Ensuite, je me suis livré à une course contre la montre pour revenir en queue de peloton où m’attendaient tous mes équipiers. J’avais six kilomètres pour remonter en tête. Il s’est mis à pleuvoir, j’ai fait un tout droit pour éviter la chute d’un coureur d’Astana. Johan Le Bon a fait un travail énorme pour me remonter encore mais en débouchant dans la dernière ligne droite, j’avais encore 20 mètres à boucher sur Tom Veelers. Jamais je ne m’étais fait aussi mal sur un vélo. J’ai remonté Veelers à 50 mètres de la ligne mais je franchis l’arrivée sans aucune énergie. Je suis tombé. C’était grand et sans l’esprit collectif de mon équipe, jamais je n’aurais gagné.
Les deux victoires d’étapes suivantes étaient plus conventionnelles pour un sprinteur ?
Mais elles étaient le fruit d’un excellent travail préparatoire. Tout d’abord dans les briefings où nous avons été très minutieux pour préparer le final, en regardant la carte plusieurs fois, en ne laissant la place à aucun détail avec Laurent Pichon, Murilo Fischer et Sébastien Chavanel qui devaient m’emmener, avec Johan Le Bon qui devait travailler avant eux. Il pouvait nous arriver de nous louper mais on n’a jamais dramatisé parce que nous n’avions rien à nous reprocher. Et de toute façon, si je perdais la roue d’un équipier, il y en avait toujours un près de moi pour le suppléer. J’ai gagné mais tout le monde y mettait du sien !
Et nous avons tous remarqué l’excellent travail de Sébastien Chavanel pour te faciliter la tâche dans le dernier kilomètre ?
Seb a la capacité de se surpasser ! En début de saison, nous avons eu du mal à trouver nos repères et c’était normal mais je voyais bien qu’il avait toujours la volonté de bien faire. C’est un coureur qui sait se faire mal, il donne toujours 100% de ce qu’il a.
On l’a vu le dernier jour à Trieste ?
Exactement et si je ne gagne pas, ce n’est pas de sa faute mais de la mienne. Il m’a super bien emmené mais j’avais peur de la chute… Moi qui n’ai jamais eu peur de la chute, cette idée ne m’avais jamais frôlé l’esprit mais là, j’avais le maillot rouge. A 600 mètres de la ligne, j’ai perdu sa roue et j’ai reculé un peu. J’ai déboité sur la gauche, dans le vent mais je ne voulais pas frotter. Je finis quatrième de l’étape mais j’ai gagné le maillot rouge. Avec les trois victoires d’étapes, je suis très content de mon bilan.
Par ce bilan, penses tu que le peloton te regarde autrement désormais ?
Je pense que j’ai gagné le respect des autres, beaucoup de coureurs sont venus me féliciter. Et puis il y avait un truc incroyable avec les spectateurs, c’est fou ce que j’ai été encouragé ! Il y a beaucoup de passion pour le cyclisme en Italie et je dois dire que dans le Zoncolan, c’était magique.
Et pour la première fois tu boucles un Grand Tour, en ayant bien passé la montagne ?
Cette dernière semaine était vraiment difficile mais je n’ai jamais paniqué. Dans ce Tour d’Italie, j’ai connu un seul mauvais moment, dans l’étape du San Pellegrino. J’ai souffert de maux de ventre dans les 60 derniers kilomètres mais sinon, je n’ai jamais eu de souci pour prendre le gruppetto. Avant moi, il y avait 40 coureurs qui étaient en difficulté, j’étais loin d’être le plus mauvais dans les cols. L’important était de rentrer dans les délais mais je n’ai pas douté une seule fois. Je pense que l’ambiance de l’équipe y était pour beaucoup.
L’ambiance fait en effet l’unanimité entre vous ?
On était une vraie bande de copains, contents d’être ensemble en course, contents d’être à table ensemble pour rigoler, contents mêmes de repartir le lendemain. Ça donnait de la force ! Lundi, nous nous sommes retrouvés dans un restaurant de Trévise que connaissait bien Murilo pour continuer de vivre ça ensemble. Bon maintenant que je rentre en France, ça me lâche un peu, je sens bien que j’ai besoin de me reposer. Je vais le faire durant ces deux ou trois prochains jours avant de reprendre mon vélo et de faire de bonnes charges de travail la semaine prochaine. Le Giro, désormais, est derrière moi !
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