À Ponteareas, où les coureurs de la Vuelta se retrouvaient ce mardi, le départ exigeait de chacun que la journée de repos ait été bien digérée. Car si trois difficultés parsemaient les soixante derniers kilomètres de la dixième étape, un col de deuxième catégorie intervenait après tout juste dix bornes de course, et il était écrit que l’échappée ne se formerait pas facilement. « Il y a un tempo d’enfer pendant un long moment, exposait Thierry Bricaud. On savait que ça allait beaucoup bagarrer. Les routes étaient propices et les échappées ont de vraies chances d’aller au bout toute la semaine ». Immédiatement dans l’allure, Stefan Küng, Rémy Rochas et Quentin Pacher se sont mêlés à la bagarre, avant mais aussi pendant la première ascension. « C’est signe qu’ils ont bien récupéré et qu’ils sont toujours aussi motivés », ajoutait Thierry. Peu avant le sommet, un trio composé de Wout van Aert, William Junior Lecerf et Marc Soler a ouvert une brèche, et quelques minutes plus tard, Quentin Pacher a tenté de s’y engouffrer avec Juri Hollmann pour recoller au groupe de tête. Ce fût chose faite peu après la descente du col, mais il a encore fallu batailler vingt kilomètres supplémentaires pour réellement faire plier le peloton.

« Je n’avais plus trop d’options », Quentin Pacher

« J’ai fini la semaine dernière un peu cramé, et j’avais vraiment besoin de cette journée de repos, confiait Quentin. J’avais envie d’être dans l’échappée, mais quand j’ai vu qu’on n’était que cinq je me suis dit que ça allait être un peu court. Je pensais que d’autres coureurs allaient revenir du peloton mais ça n’a pas été le cas, donc on a essayé de rouler le plus fort possible pour avoir un gros écart avant les trois dernières montées ». Le quintette a parfaitement collaboré et finalement pu aborder la première des trois ascensions du final, l’Alto de Vilachan, avec un capital temps supérieur à cinq minutes. Ils ont aussi franchi cette difficulté, et la suivante, l’Alto de Mabia, roue dans roue et sans s’attaquer. Ce n’est qu’à l’approche du sprint intermédiaire, à trente bornes du but, que les hostilités ont débuté. Wout van Aert a accéléré, et Quentin Pacher n’a pas hésité. « Au début, tu penses qu’il va juste faire le sprint, puis tu te rends compte que personne n’allait le lui contester, commentait Quentin. S’il le faisait, c’est donc qu’il voulait essayer de faire un écart et anticiper un peu la bosse. Le plus dur aujourd’hui a été de ne pas perdre sa roue à ce moment-là. Je me suis vraiment infligé un effort violent pour rester avec lui. C’était le moment-clé de la course. Je savais que si je ne rentrais pas, je ne l’aurais jamais revu. Il a fallu digérer cet effort ».

Au terme d’une poursuite brève mais intense, le coureur de la Groupama-FDJ a bien pu attaquer l’Alto de Mougás (10 km à 6%) avec l’ogre belge, vingt secondes environ devant le reste de l’échappée. Un écart qui a légèrement augmenté au fil de la montée. « Je me suis bien accroché à sa roue, il était sacrément costaud dans les ascensions, ajoutait Quentin. J’avais envie de collaborer, mais sans trop me découvrir ». Le Libournais a ainsi continué à passer des relais en tête de course, et le duo a basculé au sommet avec près d’une quarantaine de secondes d’avance. Dans la descente, leur avantage a rapidement passé la barre de la minute sur leurs plus proches poursuivants, puis un final assez rectiligne, malgré une courte bosse d’un kilomètre, s’est présenté à eux. « Une fois qu’on avait passé le col, je n’avais plus trop d’options pour essayer de le sortir, soufflait Quentin. C’est un coureur difficile à battre parce qu’il sait tout faire. Il grimpe bien, il sprinte bien et il descend bien ». Le Français a bien tenté de le surprendre à 1500 mètres de la ligne, mais le maillot vert de la Vuelta a immédiatement sauté dans sa roue. Il ne l’a dès lors plus quittée, en attendant patiemment le sprint. Dans cette configuration, Quentin Pacher n’a dès lors pu rivaliser avec le Belge, vainqueur pour la troisième fois en dix étapes.

« Ce n’était pas le bon client en face », Thierry Bricaud

« Je n’ai pas grand-chose à me reprocher, confiait Quentin. Je suis juste tombé sur un des meilleurs coureurs du peloton. Je savais qu’en arrivant avec lui, il n’y aurait pas photo, comme pour 98% du peloton. Mais je n’avais plus trop d’énergie sur la fin. On a fait une journée plein gaz. Je ne m’attendais pas à être autant acteur aujourd’hui, et j’ai été battu par plus fort, donc je ne peux que le féliciter. Je préfère être ici et être battu par Van Aert que d’être dans le peloton. Il me reste deux semaines pour essayer, et j’espère que cette victoire viendra ». Tandis que David Gaudu a conservé sa dixième place au général, après avoir notamment bien accompagné les favoris dans la dernière ascension, Thierry Bricaud tirait un bilan pragmatique de la journée. « On avait décidé d’être offensifs, on voulait être devant, et on l’a été, disait-il. De ce point de vue, c’était top, mais ce n’était pas le bon client en face… On pouvait difficilement espérer pire comme concurrence dans une journée comme celle-là. Pour mettre au fond, il faut que toutes les planètes soient alignées. Or, on est aujourd’hui tombé sur un des meilleurs coureurs du monde. Ce n’est pas de chance pour Quentin. Ceci étant dit, ils ont tous la même envie, celle d’aller en chercher une. On a essayé aujourd’hui, et on va réessayer tous les jours de la semaine ».

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