Thibaut Pinot retrouvera l’ambiance des courses cyclistes ce week-end à l’occasion du Tout du Haut-Var. C’est un record, jamais il n’avait débuté sa saison aussi tard mais son plan est clair : il veut disputer deux Grands Tours dans la meilleure condition et réussir un Tour de France digne de lui, de son très grand talent.
Thibaut, samedi matin il ne s’agira pas de ton premier dossard ?
Non puisque j’ai disputé le week-end dernier la Transjurassienne, l’une des grandes courses françaises de ski de fond. Ce sport, je pense c’est l’un des plus durs, peut-être plus encore que le vélo. Il n’existe pas de courses de ski de fond de cinq heures parce que ce n’est tout simplement pas possible. Dans le cyclisme, ce sont surtout les jambes. Dans le ski de fond, ce sont les jambes et les bras. J’ai eu des moments difficiles parce que j’ai fait 60 kilomètres à un rythme élevé mais le vélo m’a servi à bien gérer ça pendant 2h40. J’ai pris la cinquantième place.
Ce que tout le monde salue comme un exploit ! Maintenant c’est place au cyclisme ?
Oui et cette semaine je roule avec Arthur Vichot dans le sud de la France. Ce premier dossard en ski de fond, c’était un peu plus de stress mais j’ai fait ça pour patienter et trouver un challenge pour me booster. J’ai pas mal pratiqué le ski de fond durant l’hiver. Il fallait aussi que je compense parce que cette année, je dispute ma première course cycliste trois semaines plus tard que d’habitude dans le Tour du Haut-Var.
Et comment te sens-tu sur ton vélo ?
Je vais bien. Je ne suis pas dans la forme de ma vie mais la condition physique est correcte compte tenu de ce que j’ai fait à l’entraînement. J’ai coupé la saison dernière au soir du Tour de Lombardie et j’ai repris mon vélo fin novembre. C’était la première fois que je le faisais aussi tard. On a eu un mois de décembre compliqué dans les Vosges avec la météo et la semaine de stage à Calpe était la seule de vélo. Sinon, j’ai dû faire du home-trainer et du ski de fond.
« Je veux prendre le départ du Tour en forme »
Comment s’est imposée l’idée que tu reprennes tard cette saison, que tu coures moins aussi ?
J’avais envie de ça. Je ne veux pas passer à côté du Tour de France comme je le fais depuis deux ans. Je veux prendre le départ du Tour en forme. J’ai compris il y a deux ans et j’en ai eu la confirmation l’an dernier, que mon statut exige que je sois bien dans les Grands Tours et au Tour de Lombardie. Le reste on s’en fout. Gagner une étape de la Ruta del Sol même si c’est devant Valverde et Contador et finir troisième de Tirreno-Adriatico, on oublie vite. C’est frustrant mais il est des victoires que tout le monde a oublié à part moi. Je reprends donc dans le Tour du Haut-Var, tranquillement. Je fais un stage dans le sud, cette course fait partie de mon stage. J’y vais pour aider Rudy Molard qui est en bonne condition et qui a beaucoup travaillé pour moi en 2017. Je veux lui renvoyer l’ascenseur. Le Var c’est ma deuxième maison, la course n’est pas loin mais j’aurais pu tout aussi bien reprendre au Tour de Catalogne qui ne sera pas davantage un objectif.
As-tu les bons repères avant d’aborder cette saison ?
C’est une autre manière de l’aborder. Ce n’est pas ce que je préfère puisque j’aime la pluie et le froid, des conditions de course qui sont fréquentes en février, mars et avril. Faire différemment peut être un risque mais je n’ai pas de frustration puisque dans ma tête c’est clair depuis le Tour de Lombardie. Je savais reprendre plus tard et devoir regarder les premières courses à la télé. Je m’y étais préparé.
Ton premier grand défi est donc le Tour d’Italie ?
Oui c’est le Giro et rien avant. J’axe tout sur les deux Grands Tours en espérant arriver à premier pic de forme au Tour des Alpes et pas avant.
L’an dernier tu avais axé ta préparation du Giro sur la montagne. Cette année tu as déjà défini une stratégie ?
J’ai vu le parcours, pas dans les détails. En 2016 j’avais décroché mon titre de champion de France du contre la montre, c’était un objectif de carrière. Ensuite, j’ai éprouvé un peu de lassitude même si j’ai continué de le travailler, mais peut-être avec moins de concentration. Je vais vraiment me remettre dedans pour ne pas être frustré comme au Giro. J’avais laissé passer le podium dans les deux chronos. L’an dernier j’avais été en forme de février jusqu’au 28 mai, là j’envisage les choses autrement même si je ne vais pas me prendre la tête avec le championnat de France de contre la montre. Je focalise aussi sur la gestion du mois de juin. Après le Giro je prendrai une semaine de repos avant de penser au Tour. L’an dernier, j’étais fatigué, j’ai chopé deux bronchites puis des maux d’estomac pendant le Tour.
Penses-tu pouvoir gérer la pression inhérente à ton statut ?
Je me suis posé les bonnes questions après le Tour 2017. Je me suis fait plaisir dans le Tour de l’Ain en août, puis dans les classiques italiennes qui sont mes courses. Je n’ai pas de pression, j’ai très bien compris que le Tour c’est tout. Ce que je fais avant ne sert à rien, que je gagne ou que je perde, on s’en tape. Ce qui compte c’est le bilan à la fin de la saison.
Par Gilles Le Roc’h
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