Après avoir défendu les couleurs de la structure Groupama-FDJ en tant que coureurs, ils sont nombreux à désormais officier dans l’organisation à divers postes. La reconversion au sein de l’équipe peut sembler naturelle, mais elle n’est pas pour autant anodine. Nous sommes allés à la rencontre de plusieurs de ces « reconvertis ». Aujourd’hui, place à William Bonnet. Capitaine de route exemplaire de l’Équipe cycliste Groupama-FDJ de 2011 à 2021, le Berrichon est désormais responsable de la logistique course.

William, quel a été ton rapport à la reconversion ?

Ce n’est pas quelque chose à laquelle je pensais lorsque j’étais coureur. J’estimais que le métier de coureur demandait déjà une attention suffisante. Me concentrer sur mon métier premier était pour moi l’essentiel, et je m’étais dit que je verrais ça le moment venu. Je n’y ai donc pas pensé durant ma carrière. Sur la fin, tu commences forcément à réfléchir un petit peu, mais j’avais surtout envie de finir ma carrière de la meilleure manière. Ce n’était pas ma préoccupation première. Puis, on a eu des échanges avec l’équipe durant ma dernière année. Savoir qu’ils me proposeraient éventuellement un poste dans l’équipe était naturellement plus rassurant et m’a permis d’aborder facilement la suite.

« J’ai toujours eu de l’intérêt pour la vie que le staff pouvait mener »

Ta volonté était-elle de demeurer dans le monde du vélo ?

Très franchement, je me disais qu’il y avait plein de choses à faire dans la vie, et pas forcément que le sport. Ce n’était pas une obligation pour moi de rester dans le vélo. Ceci étant, le sport est ce qui a guidé et construit ma vie jusqu’à mes quarante ans. C’est donc quelque chose d’important pour moi. J’avais aussi des besoins personnels ; ne pas repartir tout le temps sur les routes, être plus présent chez moi. Quand on est coureur, on te demande généralement si devenir directeur sportif pourrait t’intéresser. Dans l’immédiat, je n’en avais pas forcément envie. J’avais plutôt envie de me poser un peu et de profiter aussi de ma famille.

Comment la transition s’est-elle effectuée, concrètement ?

Tout comme j’ai pris ma retraite en tant que coureur, certaines personnes de la structure partent aussi en retraite, naturellement. Il y a du renouvellement, régulièrement, et on savait que Martial Gayant allait bientôt pouvoir partir et qu’un poste allait donc se libérer. La direction de l’équipe en a discuté en interne pour savoir qui pouvait reprendre le poste, et ils ont pensé à moi. On en a parlé entre nous, et c’était une opportunité qui m’intéressait de par le poste en lui-même et ce en quoi il consiste. N’étant pas loin du service course, c’était aussi parfait pour ce que je recherchais dans l’immédiat. Suite à mon arrêt de carrière, j’ai pris un peu de temps pour me poser mais j’ai tout de suite été intégré à des réunions pour voir comment se déroulait la vie de l’équipe du point de vue logistique, dans les coulisses, ce que nous coureurs ne maîtrisons pas trop, et ce que l’on ne soupçonne pas. La première année était intéressante. Je faisais quelques passages dans l’équipe pour m’imprégner aussi de ce qu’allait être mon futur rôle.

Pourquoi avoir accepté un rôle assez décorrélé de l’aspect sportif ?

La première raison était un désir d’être un peu plus sédentaire, de moins partir, car comme beaucoup de coureurs, j’ai sacrifié beaucoup de choses durant ma carrière vis à vis de la famille. J’avais besoin de me retrouver chez moi. L’autre raison est que j’ai toujours eu une bonne relation avec le staff, les assistants, les mécanos, et de l’intérêt pour la vie qu’ils pouvaient mener. Ça m’a toujours intéressé de savoir ce qu’ils faisaient, comment se passait leur quotidien. C’est aussi pour cela que travailler avec eux, sur leur programme, leur planning, leurs besoins, est quelque chose qui m’intéressait. On s’est côtoyé pendant toutes ces années, et je pouvais aussi parfois les entendre râler ou avoir des demandes. J’ai maintenant l’occasion de répondre à leurs besoins et demandes tout en ayant pour objectif que l’équipe fonctionne bien. Je me suis posé la question de savoir si le terrain à la longue n’allait pas me manquer, mais rien ne m’empêche d’aller y faire un tour si j’en ressens le besoin.

« Il faut faire preuve d’adaptation »

Peux-tu nous exposer ton rôle aujourd’hui ?

Je suis responsable de la logistique course. Cela touche donc aux plannings des assistants, kinés, mécaniciens. Il faut organiser leurs programmes, leurs passages au service course, leurs déplacements, prévoir les temps de travail de chacun, savoir quand, comment et où ils interviennent. Pour résumer, je dois faire en sorte que tout et tout le monde soit au bon endroit au bon moment, que le personnel, les véhicules ou les vélos soient en nombre suffisants. J’ai aussi à ma charge la gestion du parc automobile. Je dois gérer tout cela pour faire en sorte que l’équipe puisse travailler dans de bonnes conditions en stage ou en compétition.

Martial disait aussi que son rôle consistait, entre autres, à « régler toutes les merdes » ?

On essaie d’anticiper beaucoup de choses, mais il faut surtout gérer les aléas, c’est vrai. Martial savait de quoi il parlait, il a beaucoup d’expérience. Moi, je découvre encore, et ce n’est pas un poste évident à gérer. Il y a beaucoup de choses à mettre en place mais on reste aussi dépendants de beaucoup de choses ou d’intervenants extérieurs. C’est beaucoup de problèmes à régler, beaucoup d’imprévus à gérer, mais avec le soutien de mes collègues, on arrive toujours à répondre à ces aléas. Il faut parfois savoir faire preuve d’adaptation, mais ça fait partie de ce métier.

As-tu pu apprendre de Martial en 2022 ?

L’année avec Martial a été enrichissante pour voir comment ça se passait concrètement. Maintenant, Martial avait une mécanique qui lui était propre et je ne suis pas là pour faire du copier-coller. Surtout, son expérience était si importante que certaines choses étaient très simples à gérer pour lui. Je n’ai pas encore son expérience, il va falloir que j’apprenne. Cette première année ne va pas être simple, c’est certain. Il y a plein de mécanismes à assimiler, beaucoup de véhicules et de monde à gérer, qui sont parfois répartis sur trois fronts et des destinations complètement opposées. Cette première saison va être intense, stressante, mais je pense qu’elle m’apportera beaucoup pour la suite.

« Je n’ai pas que ma seule personne à gérer »

Ressens-tu une petite pression dans ce nouveau poste ?

Je sais bien que si le matériel n’est pas au bon endroit, l’équipe ne pourra pas travailler comme il se doit. Ça met forcément une pression, et comme je le disais, il y a des éléments extérieurs qui font qu’on ne maîtrise pas toujours tout. Il faut parfois répondre dans l’urgence. Or, quand j’étais coureur, je n’avais que moi-même à maîtriser. De ce point de vue, c’était plus facile en tant que coureur que désormais en tant que responsable de la logistique. Je n’ai pas que ma seule personne à gérer, et on ne maîtrise pas tout. Là est la difficulté.

Ton expérience de coureur peut-elle t’apporter à certains moments ?

C’est quand même très différent, mais le fait d’avoir eu une grosse carrière me permet d’avoir du recul sur les éventuels besoins que l’équipe peut avoir. Je m’appuie aussi sur différentes personnes : Guillaume Bouveret, responsable des mécanos, Stéphane Pauchard, qui travaille à l’intendance du service course, les directeurs sportifs, avec qui on échange souvent, mais aussi les secrétaires qui sont très importantes dans la mise en place logistique. Le rôle que j’occupe aujourd’hui est assez central dans l’équipe, et c’est ce qui m’intéressait : pouvoir toucher un peu à tout, être en relation avec un peu tout le monde, de sorte à ce que tout se mette en place. Ça donne forcément lieu à beaucoup de coups de téléphone, d’échanges, et d’informations à centraliser.

Qu’aimerais-tu apporter à ce poste ?

Je ne vais pas tout révolutionner du jour au lendemain, car il y a une façon de faire qui est là, mais j’espère qu’on pourra, petit à petit, peut-être avancer sur certains points. Je pense que tout le monde dans l’équipe sera d’accord pour dire que ce que faisait Martial était quasi-parfait. Il n’y a jamais eu de problèmes de vélos ou de véhicules sur les différentes compétitions. Il a fait du super boulot, et c’est un gros challenge de reprendre son poste. Ce n’est pas rien ! On verra au fil des années comment on peut améliorer ou fluidifier ce fonctionnement. Cette première année, déjà, va me permettre de poser les bases et de me rendre davantage compte de la charge de travail. L’objectif reste quoi qu’il en soit que tout soit là en temps et en heure. C’est mon objectif à chaque fois, et c’est un objectif qui revient très souvent.

1 commentaire

Laurent

Laurent

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Le 1 février 2023 à 07:50

Bonne route à toi Wiwi
Je connais bien ton futur travail….